Un clash de titans ! À vos risques et actualité ! Entre le pouvoir Exécutif et le pouvoir législatif, c’est une guerre des tranchées. Le régime du Président Macky Sall est, depuis quelques jours, au cœur d’une affaire de corruption et de détournements révélés par la Cour des comptes sur la gestion des fonds de «Force Covid-19» de près de 1000 milliards de Fcfa. Cette affaire est un séisme pour le pouvoir Exécutif. Elle met en grande difficulté Macky Sall et sa famille politique. Il s’agit de scandales d’intégrité et d’éthique les plus choquants. Pour nettoyer les écuries d’Augias, des membres du pouvoir Législatif ont eu des idées et se sont retroussé les manches.
Après les épisodes de l’installation du Président de l’Assemblée Nationale, les passages mouvementés des ministres et de leur patron, Amadou Ba, au moment du marathon budgétaire, l’opposition parlementaire ne tient pas à lâcher prise face à un pouvoir Exécutif qui veut dicter sa loi et son agenda. Les députés Aminata Touré et Guy Marius Sagna ont saisi ce lundi le Conseil constitutionnel «en arbitrage pour conflit de compétence entre le pouvoir Exécutif et le Pouvoir Législatif». Les deux députés de pointer : «En vertu de l’article 85 alinéa 2 de la Constitution, «Les députés peuvent poser au Premier Ministre et aux autres membres du gouvernement, qui sont tenus d’y répondre, (…) des question d’actualité». C’est sur la base de cette disposition que nous avions déposé, le 19 décembre 2022, une question d’actualité au Gouvernement». Ils précisent : «À ce jour, malgré l’accusé de réception de la question par qui de droit, nous sommes au regret de constater le refus injustifié du Gouvernement de se soumettre à ses obligations constitutionnelles». Aminata Touré et Guy Marius Sagna de marteler : «Il est évident qu’au regard de la Constitution ni le Premier ministre encore moins un membre du Gouvernement ne peut se prévaloir d’aucune règle pertinente pour refuser de répondre à une question d’actualité posée par un député. En la matière, le Gouvernement a une compétence liée à laquelle il n’est prévue aucune dérogation ni pouvoir d’appréciation». L’arbitrage sollicité par la député non-inscrite et celui du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi repose « sur la base de l’article 92 alinéa 1 de la Constitution en vertu duquel « le Conseil constitutionnel connaît de la constitutionnalité (…) des conflits de compétence entre le pouvoir Exécutif et le pouvoir Législatif (…)». l’objectif des députés est clair : «le Conseil constitutionnel en tant que garant ultime de l’État de droit a la responsabilité de rétablir l’équilibre des pouvoirs».
Le peuple attend une prise en charge stricte sur les cas de détournements, fautes de gestion et dépenses hors covid décelés par les vérificateurs de la Cour des comptes. Et sur ce registre, Aminata Touré et Guy Marius Sagna comptent porter l’estocade au Président Macky Sall et à son régime qui usent d’entourloupes pour dépasser cette situation alambiquée. Ils ont perdu la face devant les populations, la société civile et les partenaires financiers et techniques du Sénégal. Mais ils semblent verser dans le déni puisque le contexte politique, avec une présidentielle en vue et un opposant tenace, Ousmane Sonko, ne leur sont pas favorables. D’autant plus que le patron de Pastef avait averti sur l’impératif d’une transparence dans la gestion de cette manne, au sortir d’une audience avec le Chef de l’État. Les pratiques du régime, in fine, lui ont donné raison sur toute la ligne. Un coup de popularité et de légitimité pour le maire de Ziguinchor! En jouant dans le dilatoire, l’Exécutif est en train de perdre des plumes dans cette affaire. Le ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, après le ministre Mansour Faye, est en train de déconstruire les recommandations de la Cour des comptes. Elle n’a pas le pouvoir de demander des informations judiciaires fait croire le Garde des Sceaux. C’est à croire que cette affaire risque de ne pas finir de si tôt, malgré les contre feux et les sorties médiatiques sur des affaires périphériques. En effet, les décrypteurs d’arcanes politiques, de gouvernance et autres grands-prêtres du temple médiatico-politique ne savent plus à quel saint se vouer avec ce grand chambardement au cœur de la République.
Le Président Macky Sall par son déni démesuré et son aveuglement vient de détruire une grande partie de son assurance vie, cette obligation de faire barrage au pouvoir Législatif, à l’opposition et à la société civile. Si l’Exécutif refuse le choix que lui propose les députés Touré et Sagna, il va en pâtir politiquement. Puisque les sénégalais, dans leur plus grande majorité, sont en attente, depuis belle lurette, de gouvernants responsables. Et surtout démocrates. Véritablement démocrates. Dans ces scandales du fonds «Force Covid-19», le peuple est roi, mais le roi est nu et il le sait.
Abdoulaye DIOP