Une pandémie de covid-19, affaire de tous ! Le Président de la République, Macky Sall, avait beaucoup communiqué, sollicité et mobilisé le peuple. Des sacrifices ont été consentis. Les guides religieux, hommes d’affaires, entreprises, journalistes, jusqu’au petit commerçant du secteur informel ont puisé dans leur poche pour participer à l’effort national. Un discours à la nation a été tenu pour informer sur la nature du danger et les mesures prises pour lutter contre le virus. Des restrictions sur les libertés de circulation et de rassemblement ont été imposées. La sociabilité réduite. Des milliers de décès et un personnel médical exposé.
L’Assemblée nationale avait voté une loi habilitant le Président Macky Sall à «prendre, par ordonnances, des mesures relevant du domaine de la loi pour faire face à la pandémie du Covid-19. Parce que nous avions devant nous un ennemi imprévisible qui pouvait frapper à tout moment.
Résultat des courses : les vérificateurs de la Cour des Comptes nous apprennent qu’une bonne partie de la manne a été utilisée à d’autres fins et manière pas très orthodoxe. Il nous revient que les partenaires financiers et techniques du Sénégal sont sans voix. C’est le débat dans les représentations diplomatiques accréditées au Sénégal. Comment les fonctionnaires du Fonds Monétaire International (FMI), la Banque Mondiale (BM) et au-delà, vont qualifier les autorités et la situation du pays ? Ce rapport de la Cour des Comptes met à nu un manque de sérieux total dans la gestion de cette manne, dans un contexte économique difficile et de rareté des ressources financières.
«En 2020, les partenaires techniques et financiers avaient supporté les ressources du Plan de Résilience Économique et Social (PRES) à hauteur de 84,5% (667,371 milliards de Fcfa, les contributions volontaires constituaient 2,5% (19,958 milliards de Fcfa) et le financement interne de l’État était de 13% (102,25 milliards de Fcfa). En 2021, après exploitation des situations de décaissement produites par la DODP et du relevé du compte de dépôt n° 3683106 «Force Covid» de la Trésorerie générale, il ressort un montant de 15,45 milliards FCFA mobilisé au titre des ressources destinées au financement de la lutte contre la pandémie. Ce montant est reparti entre la BID, l’Uemoa et la Banque mondiale pour respectivement, 11,39 milliards de Fcfa, 1 milliard de Fcfa et 3,06 milliards de Fcfa», renseigne le rapport. Selon certaines indiscrétions, les partenaires du Sénégal recevaient des rapports du ministère des Finances et du Budget et des équipes du général Ndiaye. Ce qui est attesté, d’ailleurs, par le communiqué du FMI en date de juin 2021. «La pandémie de covid-19 a eu de graves retombées sur l’économie sénégalaise, lesquelles ont été atténuées par la riposte vigoureuse des autorités. La publication de rapports trimestriels d’exécution budgétaire présentant en détail les dépenses liées à la covid-19 et du rapport du comité de suivi du fonds Force Covid-19 fait partie des démarches importantes pour garantir la reddition de comptes sur ces dépenses», avait noté l’institution de Bretton Wood. Au révélateur des analyses des vérificateurs sénégalais, les partenaires seraient amenés à douter de l’objectivité des rapports reçus. Ils se rendront compte des errances et insuffisances du régime qui, malheureusement, les édifient davantage sur les lacunes de ceux qui ont présentement entre leurs mains les destins des citoyens sénégalais. Les détournements d’objectif et de deniers publics demeurent une blessure tenace et chronique et une marque forte de la désillusion. Rien ne vaut, aujourd’hui, de sacrifier ou de fragiliser des relations séculaires avec des partenaires. Le pays est plus sur des bases politiciennes que structurelles. La vérité finit toujours par atteindre le sommet. La crédibilité d’un État et la viabilité d’une nation sont à ce prix.
Abdoulaye DIOP